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{29.9.03}

 
deux poids, deux mesures

J’ai beau être, d’après ce vieux bouffeur de curés d’Aristophane, un catholique « un peu atypique », je commence à en avoir plein le dos d’une culture qui sanctionne le moindre soupçon d’anti-quoi que ce soit, mais qui pratique avec enthousiasme un antichristianisme et surtout un anti-catholicisme rabiques.

On ne compte plus les films blasphématoires (« La Dernière Tentation du Christ » de Martin Scorcese) et anti-catholiques (le très anecdotique « Priest », de Antonia Bird, ou l'infâme « Amen » de Constantin Costa-Gavras ) mais gare à celui qui voudrait pondre un film catholique !

C’est ce qu’est en train de découvrir Mel Gibson, dont le prochain film retrace la passion du Christ. Malgré le fait qu’à peu près personne n’ait eu l’occasion de le voir, les censeurs habituels - des professionnels de l’anti-antisémitisme aux gauchistes de bénitier - le dénoncent déjà pour son antisémitisme supposé. En effet, Gibson montre dans le film, qui dure douze heures et dont les dialogues sont entièrement en latin et en araméen – il aime faire les choses à fond le Mel ! - la scène qui suit :

Dès le matin, les grands prêtres tinrent conseil avec les anciens, les scribes et le Sanhédrin tout entier. Ils lièrent Jésus, l'emmenèrent et le livrèrent à Pilate.
Pilate l'interrogea : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus lui répond : « C'est toi qui le dis. »
Les grands prêtres portaient contre lui beaucoup d'accusations. Pilate l'interrogeait de nouveau : « Tu ne réponds rien ? Vois toutes les accusations qu'ils portent contre toi. »
Mais Jésus ne répondit plus rien, de sorte que Pilate était étonné.
A chaque fête, il leur relâchait un prisonnier, celui qu'ils réclamaient.
Or celui qu'on appelait Barabbas était en prison avec les émeutiers qui avaient commis un meurtre pendant l'émeute.
La foule monta et se mit à demander ce qu'il leur accordait d'habitude.
Pilate leur répondit : « Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? »
Car il voyait bien que les grands prêtres l'avaient livré par jalousie.
Les grands prêtres excitèrent la foule pour qu'il leur relâche plutôt Barabbas.
Prenant encore la parole, Pilate leur disait : « Que ferai-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs ? »
De nouveau, ils crièrent : « Crucifie-le ! »
Pilate leur disait : « Qu'a-t-il donc fait de mal ? » Ils crièrent de plus en plus fort : « Crucifie-le ! »
Pilate, voulant contenter la foule, leur relâcha Barabbas et il livra Jésus, après l'avoir fait flageller, pour qu'il soit crucifié.
(Marc, 15, 1-15)


Comme le relève très justement le Rabbin Daniel Lapin, ce que nos censeurs reprochent à Gibson, c’est de s’en tenir très précisément au texte des écritures chrétiennes. Plutôt que d’accabler Gibson, on aimerait que ces braves gens aient le courage de dénoncer le récit de la Passion lui-même pour son antisémitisme, juste histoire de rigoler un brin.

Le Rabbin Lapin remarque d’ailleurs à très juste titre que, tant qu'à faire, on pourrait exiger que l’on expurge les textes religieux du monde de toute référence négative quelconque à un groupe ou l’autre. Je sais bien que le politiquement correct ne s’embarrasse que très rarement de bon sens, mais on ose tout de même espérer qu'il y a des limites à la bêtise.

Très franchement, en cette époque où un catholique n’est acceptable que s’il est émasculé, j’espère ne pas être le seul à me contre-taper des petits sentiments délicats et blessés des bien-pensants, Juifs ou non, à la lecture de l’Evangile, tout simplement parce que je n’ai aucune sympathie pour la stupidité et/ou la mauvaise foi. Est-ce que je me vexe parce que le Talmud contient des passages peu flatteurs au sujet de Jésus ? Restons sérieux.

Si les chrétiens et même l’Eglise ont souvent maltraité les Juifs, et généralement de manière horrible, cela fait tout de même un bail que cette triste époque a pris fin, et après tout, la vérité conserve ses droits. En l’occurrence, il ne fait rigoureusement aucun doute - sauf aux yeux de quelque positiviste poussiéreux attardé au 19ème siècle - que Jésus a réellement existé et qu’il a été condamné à mort pour avoir enfreint la loi Juive, du moins d’après ses juges. Dommage que l’événement éclaire d’une lumière peu flatteuse les autorités Juives de l’époque (faut reconnaître que c’était une belle connerie…), mais c’est comme ça. Après tout, à ce jeu-là, il faudra bientôt confectionner une version garantie non-antisémite de l’Ancien Testament, qui contient lui aussi un certain nombre de remarques limites-limites au sujet des Juifs.

Je voudrais terminer sur deux remarques: la première, c’est que le récit de la Passion est celui d’une querelle entre Juifs vaguement arbitrée par les Romains. Jésus, sa famille, ses apôtres et à peu près tous ses disciples étaient tout aussi Juifs que leurs opposants. La deuxième est que, d’un point de vue chrétien, le Christ est mort sur la croix pour sauver l’humanité de ses péchés. Le Peuple Elu n’est donc ni plus ni moins coupable que les autres, et s’il a un quelconque statut particulier, il lui vient de son rapport privilégié avec Dieu, et basta. Le monde serait meilleur si plus de chrétiens et de Juifs pouvaient garder ces vérités à l’esprit.
posted by melodius 29.9.03



{17.9.03}

 
réflexions sur le néo-conservatisme et sa fausse parenté avec le libéralisme

Le bon Omer me fait à nouveau parvenir un texte tout à fait remarquable que je me fais un plaisir de publier. Merci Omer !


De ce côté-ci de l’Atlantique, les néo-conservateurs sont confondus avec les libéraux : d’aucuns les appellent même des « ultra-libéraux ». Pourquoi ? Tout bonnement parce que le libéralisme est identifié par une kyrielle de commentateurs paresseux aux Etats-Unis, et ceux-ci avec leurs gouvernants. Pour ces esprits empêtrés dans une logomachie inspirée du Monde diplomatique, le capitalisme est l’allié du protectionnisme et du lobby militaro-industriel. Les adversaires du capitalisme l’abhorrent parce que, nous disent-ils citant Jaurès, « il porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». Or, si cette définition correspond bien à quelque chose, ce n’est pas au capitalisme, mais à l’Etat. Bien évidemment, lorsque d'éminents intellectuels se réclamant de la philosophie libérale commettent la même erreur en identifiant l’administration Bush à la fine fleur du libéralisme, il ne faut plus s’étonner de la persistance de confusions déplorables, qui desservent la cause libérale ! Autant faire du colbertisme français un exemple de doctrine libre-échangiste !

En matière de défense individuelle, la meilleure manière d'aider des civils à se débarrasser d'un tyran n'est pas de déployer des troupes aux frais du contribuable, mais de laisser les individus aider librement les opprimés. On ne combat pas le collectivisme par le collectivisme, mais avec des solutions libérales. Ce rappel déplaît aux libéraux conservateurs (qu’il ne faut toutefois pas assimiler aux néo-conservateurs), pour lesquels le démontage des arguments étatiques constituerait un danger pour... la liberté. Ce faisant, ils confondent le Droit avec la loi et l’action étatiques. Selon eux, seul l’Etat est susceptible de garantir l’ordre et la liberté ; et toute critique de cette conception est rapidement condamnée comme une marque distinctive de gauchisme (sous prétexte qu’il existe des anarchistes collectivistes).

Or, il faut bien insister sur ce fait - que ne comprennent pas beaucoup de libéraux non libertariens - qu'un gauchiste diffère d'un libertarien en ceci que le premier refuse une intervention d'une armée qu'il n'aime pas (tout en appuyant par divers biais les exactions de celle qui a ses faveurs : communistes nord-coréens, baasistes, nervis des mollahs iraniens, etc.), et qu'il prône la subvention aux régimes les plus tyranniques au monde (pudiquement nommée "aide internationale" ou "coopération") ; tandis que le libertarien refuse l'intrusion militaire de quelque côté qu'elle vienne et qu'il condamne aussi fermement la redistribution inter-étatique. Comme les néo-conservateurs, les gauchistes raisonnent en faisant primer la logique politique ; les libertariens (peut-être pas ceux de tendance utilitariste, mais passons) font primer le Droit.

Ainsi, les quelques gouvernements européens qui ont condamné la guerre ne Irak ne l’ont pas fait parce qu’ils étaient des petits saints soucieux d’éviter des dommages collatéraux (ce en quoi, soyons de bon compte, les conservateurs et les libéraux classiques ont raison de le rappeler), mais parce qu’ils défendaient certains intérêts politiques. Songeons d’ailleurs à l’arrivée de troupes françaises en Côte d’Ivoire qui semble n’avoir dérangé que fort peu de pacifistes gauchistes tout à leur hystérie pro-chiraquienne. Par ailleurs, si la majorité des libertariens se sont opposés à la guerre en Irak, ce n’est évidemment pas parce qu’elle violerait un supposé droit de propriété de Saddam Hussein - propriété, faut-il le mentionner, acquise dans le sang, donc sans aucune légitimité. C’est parce que cette intervention - comme toutes les autres émanant du pouvoir politique - ne peut s’opérer qu’en lésant les individus : en l’occurrence, les contribuables américains d’une part ; et les civils irakiens innocents de l’autre.

En vérité, les néo-conservateurs agissent symétriquement aux antilibéraux de gauche. Comme eux, au demeurant, ils sont partisans d’une redistribution inter-étatique. Et qu’ils la veulent conditionnelle ne change rien à l’affaire, un vol est un vol. Ils souhaitent simplement rivaliser avec les gauchistes en termes de luttes d'influence et pour le pouvoir. Un peu comme les « libéraux » du MR (parti « libéral » belge francophone) qui osent affirmer que leur politique est libérale... parce qu'ils ont remplacé par leurs hommes-liges les dirigeants de telle administration autrefois dominée par les socialos et les démocrates-chrétiens ! Dans leur domaine de prédilection, la politique étrangère, les néo-conservateurs agissent de la même façon : ils veulent substituer à des despotismes fondés sur la volonté d'un seul d'autres régimes arbitraires fondés sur la « volonté du peuple »... dont ils omettent (?) de signaler qu'elle viole aussi la liberté individuelle. Le néo-conservatisme, c’est du platonisme à la Leo Strauss : une élite naturelle existe qui, seule, pourra décider ce qui est bien pour le peuple ignare. Mais leur problème est qu’au nom de la promotion de leur concept du Bien, ils refusent de s’intéresser à la question de la Justice. Ce qui est aux antipodes de la philosophie libérale et libertarienne, laquelle est premièrement une pensée du Droit. Les straussiens ne peuvent donc certainement pas la taxer -si j’ose dire - de nihilisme. On arguera que Strauss fut un adversaire résolu de la tyrannie, ainsi que l’atteste son travail scientifique. De plus, il s’intéressait au Droit naturel, comme Rothbard. Certes... sauf qu’il n’a rien compris audit Droit : combattant le relativisme qui sous-tendait le nazisme, il a cru que la Vérité ne pouvait s’incarner que dans le présumé désintéressement des hommes de l’Etat. D’après lui, le nihilisme porteur de tyrannie découlait d’un mépris pour la res publica et le « bien commun » (opinion partagée par Hannah Arendt, qui a fait de l’individualisme « bourgeois » l'une des sources... du totalitarisme !). D’où, selon lui, la nécessité de restaurer le lustre de la philosophie politique comme glorification de la Cité à la façon antique. De sorte que, ennemi sincère du despotisme, L. Strauss a cependant fourni des armes intellectuelles aux serviteurs de celui-ci ! Sortirons-nous un jour de Hobbes ?

Il convient enfin d’indiquer que, non seulement les néo-conservateurs en politique étrangère ne sont pas libéraux, mais que même en économie ils ne le sont pas. Irving ou William Kristol n’hésitent pas à dénigrer le retrait de l’Etat comme une utopie, et à fustiger le capitalisme comme immoral. Le surmoi trotskiste refait sans doute de temps en temps surface... Pour résumer, ils reprennent à leur compte la formule de l’historien Arthur Schlesinger Jr qui, dans les années 50, écrivit que la meilleure façon de combattre le communisme était de défendre et promouvoir le Welfare State. Cet intellectuel, comme ceux qui ont formé et forment encore l’équipe du Public Interest, appartient à la catégorie des personnalités que Mises a surnommées les anticommunist liberals. À l’évidence, ils refusent les méthodes les plus visibles du communisme, tout en en partagent le rejet du capitalisme et de ses fondements éthiques. L’individualisme reste à leurs yeux une notion suspecte. Pour eux, comme pour Maurras, le mot d’ordre est « politique d’abord ! » Ils jouent Hobbes contre Locke.

Certes, convenons qu’il y a des degrés dans l'étatisme, mais ce n'est pas parce que des régimes totalitaires ruinent leurs esclaves pour construire des armes, de destruction massive ou pas, que nous devons nous imaginer que la paix régnera universellement lorsque l’étatisme aura fait table rase de toute liberté. C’est le contraire qui est vrai.

Omer Vidolis
posted by melodius 17.9.03

 
qu'est-ce que le libertarianisme ?

Je m'aperçois que je n'ai pas assez mis en relief, dans mon post de hier, un lien vers un texte du Québécois Libre qui explique très clairement ce qu'est le libertarianisme.

J'espère que les personnes qui m'ont fait part de leur intérêt y trouveront une première réponse à leur questions.

Si on veut aller plus loin, il faut se déconnecter d'Internet et reprendre un bon vieux bouquin (eh oui, c'est dur la vie !)

Une bonne introduction générale en Français est le "Que sais-je" de Pierre Lemieux intitulé "L'Anarcho-capitalisme", malheureusement épuisé depuis belle lurette mais qu'il est encore possible de dénicher chez de bons bouquinistes.

"L'Ethique de la Liberté" de Murray Rothbard (titre orginal "The Ethics of Liberty") et "Vers une Société sans Etat" de David Friedman (titre original "The Machinery of Freedom"), ouvrages représentatifs des deux principales tendances anarcho-capitalistes, sont disponibles sur le site des Editions les Belles Lettres. Ceux qui tiennent à vérifier par eux-mêmes quel est le degré de pénétration réel de la "pensée unique" dans le monde des idées francophone peuvent tenter de trouver ces ouvrages fondamentaux en librairie, l'expérience est édifiante !

Un ouvrage libertarien (mais pas anarcho-capitaliste) facile à trouver est "Anarchie, Etat et Utopie" de Robert Nozick (titre original "Anarchy, State and Utopia"), que les PUF ont récemment réédité en poche. Réservé à ceux que le jargon philosophique ne déroute pas !

Pour qui voudrait poursuivre à partir de là, je conseille tout particulièrement "For a New Liberty : The Libertarian Manifesto" et "Egalitarianism as a Revolt against Nature and Other Essays" de Murray Rothbard, disponibles notamment chez Amazon.com et par Laissez Faire Books.

Enfin, on ne saurait trop conseiller la lecture, plus ardue il est vrai, des ouvrages économiques de Ludwig Von Mises et de Murray Rothbard.
posted by melodius 17.9.03



{16.9.03}

 
libertariens bis

Constantin poste un remarquable article qui rejoint mes préoccupations du moment. A lire d'urgence !
posted by melodius 16.9.03



{15.9.03}

 
libertariens ?

Je vais encore me faire traiter de sectaire, mais j’en ai marre des faux libertariens.

C’est pourtant très simple : un libertarien est soit anarcho-capitaliste - jus-naturaliste à la Rothbard ou utilitariste à la Friedman, peu importe - soit minarchiste à la Nozick ou même à la Ayn Rand*

Cette définition exclut d’emblée toute vision politique qui reconnaît à l’état des compétences qui vont au-delà de la justice, de la police, de la défense – dans le sens le plus strict du terme - et de la diplomatie. Si on va ne serait-ce qu’un fifrelin au-delà de ces limites, on est au mieux libéral, mais en aucun cas libertarien.

Comment se fait-il alors que, sur le web francophone, il y a tellement de « libertariens » dont l’idéologie semble se résumer à un soutien inconditionnel aux néo-conservateurs américains défenseurs d’un impérialisme US et à la droite sioniste israélienne, le tout nappé d’islamophobie rabique ? Pourquoi diable ces gens qui professent, il est vrai, un certain libéralisme économique (ah, le libéralisme économique !) défendent-ils le USA Patriot Act, la guerre en Irak**, la colonisation des territoires occupés, et j’en passe et des meilleures, le tout en lançant force anathèmes contre les libertariens américains, qui ont le mauvais goût de ne pas partager leurs vues ? On en arrive au point où le propre traducteur de Murray Rothbard l’accuse – à tort - d’avoir relayé les mensonges de la propagande soviétique.***

Il est un effet un article du credo libertarien que ces gens refusent d’entendre, le fameux « War is the health of the State », selon l'heureuse formule de Randolph Bourne.

Le refus du bellicisme et de l’impérialisme est une des pierres angulaires de la philosophie de Rothbard, le plus libertarien des libertariens. Le bon Murray n’a cessé de dénoncer le « welfare/warfare state » et a démontré, après tant d’autres, que les guerres étatiques mènent invariablement vers une croissance exponentielle de l’emprise de l’état sur la société et l’économie.

Comment peut-on se dire libertarien si on refuse ce constat et ses conséquences ?

Il faut bien reconnaître par ailleurs – avec un malaise profond, en ce qui me concerne - qu’une frange de ces libertariens auto-proclamés s’acoquine avec les thèses, sinon même avec les appareils de la « droite nationale » autant qu’il leur est possible sans avoir à renier leur américanophilie. On a beau, comme moi, avoir ricané au soir d’un certain 21 avril en voyant le boomerang lancé par Mitterand atterrir dans la tronche de Jospin, on a beau ne pas considérer le borgne breton comme la réincarnation de Hitler, on a beau conspuer la gauche bien-pensante qui peuple les salons parisiens, on peut tout de même s’interroger sur la nature des convergences entre ces « libertariens » – supposément anarchistes ou presque – et les tenants d’un état-nation fort.

De même, est-ce moi qui suis un délicat, ou est-ce à raison qu’il m’a souvent semblé discerner, sous la dénonciation de l’anti-racisme, il est vrai arme favorite de l’extrême gauche, un racisme tout ce qu’il y a de plus authentique, parfois couché en des termes pseudo-darwiniens afin de « libéraliser »**** le propos autant que faire se peut ?

Le contexte franco-français de polarisation gauche/droite très tendu et la tentation de s’identifier à la caricature gauchiste du grand méchant loup ultra-libéral et fasciste expliquent sans doute, au moins en partie, pourquoi tant de libéraux français se font les zélateurs du nationalisme américain et vouent une haine pathologique à la France, marâtre à laquelle on prête tous les vices, notamment celui d’être « islamisée ». On remarquera au passage que nos amis Français sont incapables de concevoir leur patrie autrement qu’absolue, que ce soit dans le bien ou dans le mal…

Quoi qu’il en soit, la carte d’identité nationale française n’est pas un permis de délire.

Qu’on me comprenne bien, il ne s’agit pas ici de diaboliser ou d’excommunier à mon tour des gens dont je ne partage pas les convictions. Par contre, il s’agit d’appeler les choses par leur nom et d’éviter d’être associés à des positions que nous ne partageons pas.

Il y a beaucoup de noms pour désigner les idées de ces « libertariens » impérialistes et occidentalistes, par exemple « néo-conservatisme », « libéral-conservatisme » ou encore « libéralisme national ». Ils pourraient avoir la courtoisie de ne pas nous voler le nôtre.




*Rand ne se considérait pas elle-même comme libertarienne.

**Merci de ne pas m’écrire pour me demander si je soutiens la dictature de Saddam Hussein. J’ai trois choses à répondre à ce genre de conneries. Tout d’abord, le choix du régime politique irakien appartient aux seuls Irakiens, surtout si on prétend leur amener la démocratie. Ensuite, je ne vois aucune objection à ce que ceux que l’existence de Saddam Hussein ou d’autres gugusses empêche de dormir montent des brigades internationales pour délivrer l’Irak sans faire chier le peuple. Enfin, comme je l’écrivais déjà ici, il n’y a pas que l’Irak dans le monde.

***Rothbard considérait en effet que les « cold warriors » exagéraient le danger soviétique et s’opposait à la croissance de l’état fédéral américain et du complexe militaro-industriel à la faveur de la guerre froide.

****note : demander à Sylvain s'il ne veut pas pondre un article sur l'imposture philosophique qu'est le darwinisme social et son caractère profondément anti-libéral.
posted by melodius 15.9.03



{10.9.03}

 
le mal français


Et patatras ! voilà que le foutu foulard « islamique » refait parler de lui. En cause, le refus d’un école officielle bruxelloise d’inscrire des jeunes filles portant ledit voile. Je ne vais pas m’étendre ici sur la question du caractère obligatoire ou non du hidjab au regard du droit islamique. Je relèverai simplement que le texte coranique invoqué à son appui (20 :31) enjoint les croyantes à se couvrir la poitrine, et non la tête, et que dans une traduction du Coran qui fait autorité, celle de Jacques Berque, une note de bas de page précise que l’interprétation traditionnelle de ce passage est, disons, « large ». Mais bon, je ne suis pas expert en charia, donc je me borne à constater que ces jeunes filles y tiennent, à leur fichu, et qu’en fin de compte, c’est cela qui importe.

Autant il paraît évident que le hidjab ne peut être un prétexte pour échapper, par exemple, au cours de natation, autant il est clair que dans le cadre constitutionnel belge, l’enseignement officiel n’a pas le droit d’imposer une quelconque conformité « laïque » à ses élèves. Contrairement à son homologue français, et cela les tenants belges de la laïcité ont tendance à l’oublier, l’enseignement officiel belge n’est pas laïc, il est neutre. La différence est de taille.

Tout d’abord, la neutralité est une obligation faite aux établissements. Les écoles officielles n’ont pas le droit de se livrer à un quelconque prosélytisme religieux ou anti-religieux en dehors des cours dits « philosophiques », c’est-à-dire de religion ou de morale laïque. Par contre, la neutralité ne saurait s'imposer aux élèves, qui ne perdent donc pas leur liberté d’expression en franchissant le portail de l’athénée.

Les écoles ne peuvent adopter dans leur règlement des dispositions qui violent les libertés fondamentales que si elles sont indispensables à la garantie de l’ordre public (suite, par exemple, à des troubles religieux entre élèves) ou à la réalisation de leur projet éducatif. Il ne fait aucun doute que l’école officielle ne peut invoquer ce dernier argument pour interdire aux élèves de porter des symboles religieux, dès lors que son projet éducatif en matière religieuse est précisément d'être neutre. Seuls les établissements confessionnels pourraient le faire. Un école juive pourrait donc parfaitement interdire le foulard aux filles et imposer la kippa aux garçons, par exemple, puisque le projet éducatif de l’école est explicitement juif.

Ce système est issu d’un compromis entre catholiques et laïcs (traditionnellement représentés par les partis socialiste et libéral) selon lequel les catholiques consentaient à la création d’un enseignement d’état – au financement duquel ils seraient donc forcés de contribuer – pour autant que cet enseignement soit neutre et que ses élèves puissent suivre, soit un cours de religion, soit un cours de morale laïque.

Contrairement à ce qui se fait en France, l’état reconnaît donc certains cultes, actuellement le catholicisme, le protestantisme, l’anglicanisme, l’orthodoxie, le judaïsme et l’islam. Cette reconnaissance implique notamment que l’état paie leurs ministres, du moins en théorie, et que les élèves des écoles officielles qui souhaitent être instruits dans une de ces religions puissent suivre un cours ad hoc.

Le problème du foulard islamique dépasse donc de loin le cadre de l’intégration des immigrés et de leurs descendants, et son interdiction constitue en réalité une remise en cause des fondements de l’école officielle et, plus largement, de la séparation « à la belge » entre l’église et l’état. A l’instar de beaucoup de Belges, étant forcé de financer une école officielle qui ne m’intéresse pas, j’estime que la moindre des choses est que cette école conserve son caractère neutre et ne se fasse pas la véhicule d’une philosophie partisane, fût-elle laïque.

Sachant de plus que le problème du foulard empoisonne la vie politique française, et que nous n’avons pas les mêmes motifs constitutionnels que les Français pour nous exciter à ce sujet, il me semble particulièrement peu opportun d’importer, en même tant que la laïcité, des problèmes juridiques qui nous sont étrangers.

L’interdiction du foulard ou de toute autre symbole religieux doit donc disparaître des règlements des écoles officielles.

PS : merci à F.J. pour les explications qu'il m'a données.

posted by melodius 10.9.03



{9.9.03}

 
le plat pays qui est le mien

Zek - fort en verve ces derniers jours - a pondu aujourd'hui un article au sujet d'un fait divers belge qui illustre parfaitement la profonde crétinerie de nos maîtres.

A lire d'urgence.

Putain de pays !
posted by melodius 9.9.03



{1.9.03}

 
introducing... omer vidolis !

Je ne résiste pas au plaisir de partager avec mes lecteurs ce texte de mon ami Omer Vidolis. Omer voue une haine corse à l'état et aux idées reçues. Je suis donc honoré de pouvoir ajouter son nom à la liste de mes guests stars.


L'ÉTAT PROVIDENCE... DES MALFAITEURS

L'État veilleur de nuit est déjà un voleur de vies. Les libéraux classiques disent condamner l'impérialisme réglementaire de l'État, car il entrerait en contradiction avec ses véritables missions : sécurité, justice, défense. On aura reconnu l'Etat minimal initialement théorisé par John Locke (bien plus que par Adam Smith, pour lequel l'intervention politique dans l'économie n'était pas entièrement condamnable). Seulement, comme l'écrit P. Salin, « faire de l'Etat un arbitre, c'est lui donner un rôle "totalitaire", c'est-à-dire en faire un instrument de limitation illégitime des libertés individuelles. » De cette faute intellectuelle, les grands précurseurs du libéralisme sont excusables : ils ont commis les erreurs propres aux pionniers les plus géniaux. Mais il est étonnant qu'aujourd'hui, alors que l'Etat n'a cessé de croître, peu de libéraux classiques acceptent une critique frontale du pouvoir étatique. Encore plus surprenante est l'attitude des minarchistes, lesquels réfléchissent comme si l'institution étatique avait pour vocation la protection de ceux qu'il exploite et spolie. Or, à vouloir un État arbitre, on ne fait que cautionner l'arbitraire étatique. De plus, en parlant à tort et à travers d'Etat régalien et souverain, on induit dans l'esprit des individus que l'Etat a tout pouvoir sur leurs choix. Comment s'étonner après cela que la plupart des gouvernements incluent désormais dans leurs prérogatives régaliennes recentrées (sic) la solidarité et la protection de l'environnement ?

L'Etat est la dernière organisation à veiller scrupuleusement au respect du Droit. À cet égard, il est plus que paradoxal que la majorité des individus placent encore un signe d'égalité entre pouvoirs publics et sécurité. La puissance étatique — issue de la violence ! — serait le meilleur garant de la sécurité des individus, voilà une thèse qui, en dépit de sa singularité, continue de sembler évidente à beaucoup. Même un auteur se réclamant du libertarianisme (tendance minarchiste, il est vrai), Charles Murray, écrit le plus naturrellement du monde : « pour qu'une société libertarienne fonctionne, il est essentiel que les gens soient privés de l'usage de la force. » Un minarchiste commet donc la même erreur qu'un étatiste classique. Ajoutons que, à l'instar de ce qui se passe dans les États totalitaires, non seulement la propagande officielle laisse peu de place aux opinions dissidentes, mais elle tente même de réécrire le passé en laissant croire qu'en tout temps et en tout lieu, les hommes ont accepté d'être désarmés par les statocrates au nom de la paix et de la sécurité de tous.

Parmi ces poncifs, il faut citer l'erreur récurrente qui consiste à voir dans l'Ouest américain du XIXe siècle une époque de sauvagerie bestiale, provoquée par l'éloignement de l'autorité centrale, la propriété privée des armes à feu et la concurrence policière. Il y a quelque vingt-cinq ans, deux auteurs ont estimé judicieux de rappeler quelques vérités occultées par les historiens, sans oublier les scénaristes de cinéma . Dans cinq des villes « sauvages » les plus importantes, pour la période 1870-85, on dénombre à peine 45 morts violentes ! Ainsi, les habitants d'Abilene n'ont pas eu à déplorer un seul meurtre en 1869-70 ! L’explication est que personne n'avait ôté aux individus le droit de se protéger contre d'éventuels agresseurs. C'est autrement dissuasif que de planter un shérif derrière chaque bandit potentiel (par définition, difficilement identifiable). Des pionniers se sont de la sorte réunis en associations chargées de protéger leurs droits de propriété, en recourant à des arbitrages privés. Des malfrats célèbres ont ainsi pu être mis hors d'état de nuire grâce à la libre possession d'armes : Jesse James n'a pas été arrêté par les fédéraux, ni par des shérifs, mais par de simples citoyens défendant la banque qu'il était en train de dévaliser.
En voulant « civiliser » les cow-boys, par un désarmement obligatoire, les agents du gouvernement ont créé les conditions de la multiplication des bandes de truands. Car a-t-on jamais vu un criminel céder volontairement son outil de travail à un policier ? Seuls des gens intimidés par la loi agissent d'une telle façon ; pas les criminels. Autrement dit : quand les armes deviennent hors-la-loi, seuls les hors-la-loi sont armés. Ce qui ne signifie évidemment pas que ceux qui conservèrent clandestinement un fusil fussent tous des assassins, ou des individus animés d'intentions malhonnêtes et agressives. Parmi les récalcitrants, il y avait aussi des gens un peu plus courageux que les autres, et plus déterminés à se défendre contre des pillards. Ils ont cependant été considérés comme autant de criminels en puissance, sous le prétexte risible que celui qui cache certaines choses à l'autorité étatique ne peut le faire que pour des raisons inavouables. Et le pire est que la majorité des gens semble approuver ce type de réflexion primitive... quand elle concerne les autres, évidemment. À ce train-là, il n'est pas invraisemblable qu'un décret prohibe l'usage des rideaux et tentures. Au nom du sacro-saint souci-démocratique-de-la-transparence, les résidents seraient de la sorte, affirmeraient les statocrates, mieux protégés par les gardiens de la paix qui pourraient surveiller plus efficacement l'intérieur de leur domicile. Et aux récalcitrants, ils répondraient d'un ton excédé : « Il faut savoir ce que vous voulez ! Quand on veut une sécurité optimo-parétienne, chacun doit consentir à des sacrifices. Et puis, quoi ! C'est ça ou alors nos agents s'installent chez vous. » L'arrogance, l'aisance à énoncer des choix qui n'en sont pas à dessein de mettre l'opposant devant de présumées contradictions, tout cela fait partie de la panoplie de l'étatiste de base.

On voit ensuite dans quel état de chaos criminel sombrent les pays qui prohibent le droit de porter des armes. La violence y est pire que dans les régions plus libérales. On sait par ailleurs que là où la possession et le port d'armes sont permis sans trop de restrictions, les malandrins commettent encore des délits, certes, mais avec moins de violence. Du moins, contre les autochtones. Ce sont malheureusement les touristes provenant de pays où règne la prohibition qui deviennent leurs cibles privilégiées. Moralité : pour éviter des agressions violentes, les gouvernements démocratiques doivent autoriser leurs concitoyens à s'armer et déréglementer toute cette législation qui bénéficie aux vrais criminels. Inutile de dire qu'en Europe, autant prêcher dans le désert.

Des démagogues suffisants se servent des meurtres commis par des lycéens pour inciter à prohiber la vente et la détention des armes à feu (et accessoirement demander le rétablissement de la censure contre des groupes de rock). Mais ils ne précisent pas que beaucoup plus de crimes sont perpétrés avec d'autres moyens, insolites ou non. D'autre part, bien des massacres ont été évités parce que des civils « hors-la-loi » avaient conservé leur arme et s'en sont servi pour abattre ou intimider des tueurs. Faudra-t-il bientôt interdire le commerce d'ustensiles de cuisine, ou de bas de soie, ou de produits ménagers, simplement parce qu'ils peuvent servir d'armes criminelles ? Vu le nombre de viols commis dans les collèges des banlieues françaises, le législateur obligera-t-il les élèves masculins à subir une castration préventive pour éviter que ce délit ne se produise ? Avec ce genre de sophismes, on peut également soutenir que, étant donné le nombre élevé de suicides de policiers commis avec leur arme de service, il conviendrait de la leur confisquer pour éviter que de telles tragédies se produisent. Mais le risque est présent dans chaque acte que nous posons. Et pour revenir à la question de la prévention, un crime n'existe que lorsqu'il a été commis ou qu'il est en train de se produire, pas lorsqu'il est envisagé préventivement comme possibilité parmi mille autres par les cerveaux des experts subsidiés.

P. Lemieux l'a fait remarquer, le contrôle des armes individuelles est le premier pas vers leur interdiction, en sorte que le pouvoir — criminel légal — et les criminels illégaux pourront agresser les individus sans rien craindre d'eux . Aucun tyran n'a été, n'est et ne sera favorable à la libre propriété des armes, il craint trop une rébellion. Communistes, fascistes, nazis, baasistes, tous ont commencé par désarmer leurs compatriotes à dessein de les mater plus efficacement. C'est également l'œuvre des bien-pensants démocrates, si soucieux de l'avis de leurs concitoyens, mais qui traitent de facho ou de parano sécuritaire quiconque veut se défendre seul. Les Pères fondateurs seraient donc, pour nos élites archéo-européennes, les ancêtres idéologiques de Hitler... pourtant monopoleur armé typique ! Si la loi interdit à quelqu'un de défendre sa propre vie, si une prime d'impunité est donc délivrée au criminel, c'est bien la preuve de l'immoralité des hommes de l'État. Reconnaissons à ceux-ci une grande cohérence intellectuelle : ils ont compris mieux que certains libéraux qu'un individu à qui on a retiré le droit de se défendre contre des criminels est un esclave prêt à obéir aux ordres de la puissance tutélaire.

Pour se constituer et s'étendre, l'État s'est depuis toujours arrogé le droit de discriminer l'ami de l'ennemi. Ce n'est pas pour rien que Carl Schmitt a été le penseur occulte de la politique au XXe siècle, ère de l'État comme l'espérait Mussolini, fidèle à son idéologie socialiste. De même, ce n'est pas par hasard que Trotsky ait encore le vent en poupe dans les milieux médiatico-politiques, n'a-t-il pas rédigé un opuscule intitulé Leur Morale et la Nôtre ? Il s'agit bien d'une théorisation des doubles critères caractéristiques de la puissance étatique. Les gouvernements interdisent le port d'armes et parfois jusqu'à leur possession, mais s'autorisent à acheter et vendre des mitraillettes, des bombes, des missiles, etc. Essentiellement des produits qui n'auraient pas connu autant de succès si les États n'existaient pas. Force est en effet de constater que nos gouvernants leur ont donné raison. Ainsi, retirer aux gens le droit de réagir aux agressions dont ils sont victimes, c'est légitimer par avance l'action des criminels. L'une des plus tragiques et terrifiantes réfutations du contrôle des armes a été apportée par les attentats du 11 septembre 2001. En effet, les pirates ont lâchement profité du désarmement des passagers respectueux des lois pour les conduire à la mort. Qu'auraient pu faire les islamistes porteurs de cutters si leurs victimes avaient eu des armes de poing à leur disposition ? Jouer profil bas. De même, les Juifs n'auraient pas été déportés et exterminés par millions si les démocraties françaises, belges, néerlandaises, scandinaves, n'avaient pas fermé le marché des armes. En débarquant chez nous, les nazis auraient trouvé face à eux des gens décidés à leur riposter et capables de sauver leur peau et celle de leurs proches.

Mais prenons des exemples moins dramatiques. Quand des habitants d'une commune périphérique à Bruxelles ont souhaité au début de l'année 2003 que des vigiles privés soient engagés pour assurer leur sécurité, le ministre de l'Intérieur leur a opposé un refus implacable, malgré l'inefficacité notoire des services publics judiciaires et policiers. Sauf lorsqu'il s'agit d'enquiquiner des gens paisibles parce qu'ils ont ceinturé un délinquant pris sur le fait, protégé par la Ligue des Droits du bandit, ou qu'ils ont commis un excès de vitesse alors qu'ils poursuivaient le truand qui les a brutalement délestés de leurs affaires. Quelle raison a invoquée l'excellence ? Tout bêtement, le monopole de la sécurité appartenant « en droit » à la puissance étatique.

Or ce que les étatistes entendent par loi n'est qu'un ersatz de l'idée de Droit, une banale tentative de justification du fait accompli... autoritairement. Car il s'agit de cautionner une habitude issue de l'usurpation étatique, qui, pour être ancestrale, n'en reste pas moins condamnable (comme toute imposture résultant de l'usage de la violence). Sans doute le dignitaire statocrate, comme ses semblables, préfère-t-il que ses sujets se fassent molester et détrousser en toute impunité. En d'autres termes, et comme je l'ai déjà relevé, le pacifisme officiel des cénacles européens dissimule un réel mépris pour la liberté individuelle. En ayant désarmé chacun par la force de lois arbitraires votées à la majorité, ils ont favorisé l'essor du crime, qui se moque par définition de toute règle morale et juridique. Alors, qui crée les conditions du chaos et de l'insécurité ? Les hommes de l'État.

Les libéraux conservateurs, qui n'imaginent pas d'autre solution que des interventions étatiques pour garantir la sécurité de leurs concitoyens, sont souvent raillés par la gauche, laquelle les traite de sécuritaires parce qu'ils n'ont d'autre proposition que l'augmentation des moyens affectés à la police en vue d'affermir l'autorité de l'État (en France, de la Rrrrépublique) — ce que la gauche ne se prive pas de faire non plus, vu qu'elle compte aussi des électeurs dans les corps armés officiels. Et comme tout ce que dit la gauche ne peut être que foutaises, les hommes de droite décident d'en prendre systématiquement le contre-pied : " Ahh, vous prétendez qu'il n'existe pas de problèmes d'insécurité... Hé bien, nous, nous affirmons que si. Et pour y remédier, rien de tel qu'une bonne police républicaine et de proximité-de-terrain. " Or, s'il est vrai — ainsi que le déplorent les représentants de la droite — que la délinquance ne fait que se développer, il est en revanche faux que cette question sera résolue en renforçant l'intervention étatique. De même qu'il est exact — comme le remarquent les politiciens et intellectuels de gauche — que la droite s'illusionne sur la solution à apporter, mais il est en même temps faux de déclarer que la violence urbaine est fictive. Droite et gauche rivalisent une fois de plus pour savoir qui des deux sera le plus étatiste. Non seulement il y a de plus en plus de policiers, non seulement de plus en plus de moyens leur sont alloués — de sorte que les exigences monopolistiques des syndicats de flics sont satisfaites —, mais la criminalité ne diminue pas. Pourquoi ? Parce que le monopole étatique crée un effet d'aubaine favorable aux délinquants (songeons aussi à la criminalisation du commerce de stupéfiants, issue de leur prohibition). Ceux-ci devraient exprimer une reconnaissance éternelle envers tous les ministres de l'Intérieur. La restriction du marché des armes au bénéfice des agents de l'État n'a jamais empêché les bandits de s'en procurer au marché noir. Que du contraire ! La plupart des honnêtes gens craignant d'enfreindre une loi, et surtout d'être perçus comme de dangereux truands, n'osent franchir ce pas. Par conséquent, seuls les criminels et les policiers sont armés. Et les victimes ont juste le droit de se taire, ou de s'excuser si elles se trouvent par malchance sur le chemin d'un malfrat. Deuxième raison : la distribution d'armes et d'emplois aux fonctionnaires de la sécurité s'opère en dehors du marché libre, donc en totale conformité avec l'économie administrée et planificatrice. Certains commissariats ont trop de personnel alors que d'autres n'en ont pas assez, déplore-t-on régulièrement. Encore une fois, l'arrogance avec laquelle les hommes de l'Etat prétendent régler des questions qui leurs sont étrangères contribue à instiller dans les esprits des sentiments d'envie. Sans libéralisation de l'offre et de la demande de sécurité, il est impossible de savoir qui a besoin de quoi. Par conséquent, la solution ne viendra pas d'initiatives bureaucratiques, telles que l'envoi de questionnaires aux agents de police (qui répondront conformément à l'idéologie de leur syndicat respectif).

Quand les libéraux régaliens prétextent de prétendues externalités causées par la libéralisation de la protection et de la justice, le libertarien peut leur démontrer tranquillement leur incohérence — et l'échec du monopole de la sécurité. Car, de deux choses l'une, ou bien le libéral est persuadé que le marché libre est plus juste que l'autoritarisme politique, et l'on ne voit pas pourquoi les services de sécurité y échapperaient ; soit il estime que le Pouvoir politique est parfois supérieur au Droit de la liberté et, en ce cas, il doit s'en expliquer. Pourquoi craindre des défaillances du marché en ce domaine ? Parce que les polices privées pourraient se retourner contre vous, arguent les libéraux conservateurs. Pourquoi, avec de tels raisonnements, ne pas nationaliser les pharmacies ? Qui sait, un apothicaire pourrait toujours vendre un produit nocif à votre santé, pour ensuite épouser votre veuve. Ou bien encore, pourquoi ne pas placer sous le contrôle de l'État les boulangeries ? Imaginez que le pâtissier emploie du ciment ou du plâtre au lieu de farine... Mais, à supposer que l'homme soit si peu digne de confiance, pourquoi un gouvernement mériterait-il plus de considération ? De plus, ne faut-il pas davantage craindre la pseudo-sécurité gracieusement offerte par l'État, par laquelle le juge et le policier peuvent se retourner contre vous sur la base de critères politiques (par exemple de lois idéologiques ou, plus généralement, contraires au Droit naturel) ? L'imposture étatique se révèle au grand jour quand, face à la répétition d'agressions dans certains quartiers exposés à la violence quotidienne, les édiles répètent, l'air pénétré : « il n'y a pas de solution miracle. » Donc les hommes de l'État, qui prétendent du matin au soir devoir s'occuper de tout, reconnaissent en définitive qu'ils sont incapables de résoudre les problèmes — dont ils sont souvent la cause. Eh bien, il est temps de les prendre au mot en reprenant notre liberté !

On l'a compris, l'alibi de l'Etat gardien de l'intégrité physique de ses citoyens ne peut être pris au sérieux. Ceux-ci sont considérés comme autant d'irresponsables et de dangers publics, dont cependant la contribution financière ne semble pas dégoûter les hommes de l'État si conciliants et désintéressés. À ce fat mépris pour l'autodétermination individuelle s'ajoute un organicisme réduisant les individus aux membres d'un corps-nation. De sorte que la défense de l'intégrité de celle-ci a pour corollaire que la survie du pouvoir étatique autorise le sacrifice de la partie pour le tout. Curieuse logique : quand il s'agit de se protéger individuellement, les sujets du Pouvoir, éternels mineurs politiques, ne peuvent pas porter d'armes, mais ils sont « cordialement invités » par la force à défendre arme au poing le pays, en fait l'appareil d'État, au risque de perdre leur propre vie. Par là, la mobilisation générale participe également de l'idée que nous ne pouvons reconnaître notre propre intérêt et que seul le gouvernement est habilité à décider ce qui relève de notre souveraineté personnelle ou non. Autrement dit, à nous la retirer dans la plupart des cas. Comme d'habitude, la morale étatique se résume en ces mots : « faites ce que je dis, pas ce que je fais. » Eux peuvent vendre et acheter des ADM, mais ils interdisent à leurs concitoyens de s'acheter un simple revolver. Notons que la capacité destructive des armes est d'autant plus importante quand ce sont des organisations étatiques qui les emploient. S'il n'y avait pas eu de puissance étatique, le monde n'aurait jamais connu les bombes nucléaires, à neutron et à hydrogène, non plus que les armes bactériologiques, etc. Toutes ces saletés ont été inventées à des fins militaires, pas dans le but d'être fournies sur un marché libre.

Accepter aujourd'hui la simple idée d'un mythique État arbitre et protecteur de la vie des individus, c'est confier au renard le soin de garder le poulailler.

Omer Vidolis
posted by melodius 1.9.03


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